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La contribution militaire belge à la politique Européenne de sécurité et de défense (Fr) – De militaire bijdrage van België aan het Europees veiligheids- en defensiebeleid (Nl), June 2007.

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La Belgique n’a pas (plus) de politique de défense. Souvent entendue, cette affirmation interpelle, car la politique de défense fait partie intégrante de la stratégie internationale d’un pays. À cet égard, la Belgique a pourtant pris une option claire. Depuis 1991 et la fin de la Guerre du Golfe, notre pays inscrit prioritairement ses positions internationales dans une perspective européenne et dans le respect du cadre des Nations unies. Cette double priorité institutionnelle est complétée par la volonté affichée de voir s’établir un pilier européen au sein de l’OTAN. La Belgique estime que l’Europe doit pouvoir tenir pleinement sa place dans un monde multipolaire. Si cela est déjà le cas sur le plan économique, ce ne l’est pas encore en matière de politique étrangère et de sécurité. En Belgique, il existe un fort consensus sur la nécessité d’un multilatéralisme effectif et institutionnalisé, afin de garantir la paix et la sécurité internationale par une approche globale de la sécurité collective. Tout comme le précédent secrétaire général de l’ONU, Koffi Annan, la Belgique estime que des règles préétablies, valant pour tous, faibles ou puissants, et des institutions crédibles et fortes, constituent la meilleure garantie pour un monde stable et juste. Dans cette perspective, l’Europe constitue sans aucun doute notre levier le plus important. La Défense tient une place essentielle dans le cadre de cette stratégie. Contrairement à ce que d’aucuns espéraient à la fin de la guerre froide, la défense demeure une composante incontournable d’une stratégie internationale crédible. Par manque de capacités militaires et d’organes adaptés de décision, l’Europe et la communauté internationale n’ont pas été capables d’intervenir à temps et de manière efficace dans une série de situations dramatiques à l’origine de souffrances humaines à grande échelle. Ces épisodes douloureux nous rappellent que, si nous voulons voir se réaliser un jour l’ambition d’une Europe pouvant jouer un rôle mondial, les moyens militaires sont indispensables. D’un autre côté, nous pouvons constater chaque jour à quel point l’usage de la seule puissance militaire peut se révéler inopérant, voire contreproductif. Pour essentiels qu’ils soient pour rétablir l’ordre et la sécurité, les moyens militaires se révèlent insuffisants pour rendre la stabilité durable et légitime, et donc pour réduire la souffrance humaine. La sécurité au 21ème siècle est par conséquent multidimensionnelle. Les moyens militaires en forment un des piliers, à côté des piliers politique, diplomatique, économique et de coopération au développement. Si l’un des piliers échoue, toute la construction vacille. L’appareil militaire n’a de sens qu’au service d’une politique de défense, laquelle, à son tour, doit s’inscrire dans la politique de sécurité d’un pays. Ces quinze dernières années, partout dans le monde, les appareils de défense ont connu une transformation continue pour s’adapter aux changements importants du contexte international. Les appareils de défense ne se transforment cependant pas aisément. En effet, étant donné la longue durée des programmes militaires, l’horizon stratégique d’une politique de défense se situe généralement entre dix et quinze ans. Cet horizon place tous les Européens devant un choix clair. Soit nous continuons la pratique actuelle qui voit chacun des vingt-sept membres de l’UE établir sa politique de défense sur une base strictement nationale, repoussant à une étape ultérieure la question d’éventuelles coopérations internationales. Cette façon de procéder met en avant la souveraineté nationale en matière de défense et conçoit la coopération internationale comme une pratique limitée basée sur le volontariat. Si cette approche présente quelques mérites, la pratique nous enseigne qu’elle ne permet de remédier ni aux multiples duplications de moyens ni aux lacunes capacitaires identifiées de longue date. Soit nous nous décidons à établir d’emblée les plans nationaux à partir d’une perspective européenne. Plusieurs pays, se sont déjà exprimés – et la Belgique de manière explicite – pour cette seconde option. Malheureusement, nous devons constater que la politique suivie dans la pratique se réduit souvent à la première option. Une partie de l’explication se situe sans aucun doute dans le fait que, sur le plan politique, il apparaît souvent plus aisé de prendre des décisions unilatérales à court terme que de s’engager dans des coopérations multilatérales dans la longue durée. À un moment où des questions fondamentales se posent sur l’avenir de l’Union européenne, cet Egmont Paper s’attache donc principalement à un plaidoyer pro-européen en matière de défense. La recherche de la paix et de la sécurité n’était-elle pas au coeur du projet d’intégration européenne? Pour leur part, les auteurs sont convaincus que le développement subséquent d’une politique de sécurité européenne peut contribuer à une relance du projet européen tant il est vrai que l’opinion publique belge et européenne est globalement acquise à l’idée d’un rôle plus ambitieux pour l’Europe dans les affaires internationales. La présente publication a pour ambition de contribuer à initier un débat informé sur les moyens militaires dont un pays comme la Belgique peut et doit pouvoir disposer pour étayer ses ambitions internationales. Comme de précédentes publications d’Egmont – Institut Royal des Relations Internationales, ce document résulte du travail d’un groupe informel constitué de personnalités issues des mondes diplomatique, militaire et académique. Ont participé à la rédaction du texte: Sven Biscop (Egmont), Jo Coelmont (Représentant permanent militaire de la Belgique près du Comité Militaire de UE), Rik Coolsaet (Egmont & Université de Gand), Michel Liégeois (Université Catholique de Louvain-la- Neuve), Jacques Rosiers (Département Stratégie à l’État-major de Défense) et Dirk Wouters (Représentant permanent de la Belgique au Comité politique et de Sécurité). D’autres contributeurs ont préféré garder l’anonymat. Chaque membre du groupe de travail a participé à titre personnel1. Ce travail comprend trois parties. La première précise le rôle de l’armée dans une Europe où la menace militaire directe a disparu. La seconde partie propose une analyse «forces/faiblesses» de l’armée belge. Sur cette base, la troisième partie formule onze recommandations, afin de renforcer les points forts et remédier aux points faibles.
(Photo credit: Wikimedia Commons)