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L’Arctique : nouvel eldorado géoéconomique

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A travers cette analyse, nous observons que l’enjeu en Arctique compte plusieurs volets : La géoéconomie (les matières premières), la géopolitique (le contrôle des voies et accès maritimes) et la géostratégie (le renforcement et repositionnement des moyens militaires). Si ces différents volets se caractérisent par leur composante spatiale intrinsèque, ils doivent cependant être mis ici en perspective avec une quatrième dimension, d’ordre temporel, relative à la représentation prospective que les acteurs ont de leurs intérêts nationaux. Rappelons-le, l’accès aux richesses de l’Arctique n’est pas encore une réalité d’aujourd’hui mais bien une ambition de demain. Chacun se projette donc dans l’avenir en cherchant à renforcer tout aussi bien sa présence physique que ses arguments juridiques au regard de la région Arctique afin que, le moment venu, le rapport de force et/ou la légitimité fasse pencher la balance en faveur de ses revendications de souveraineté sur la région du Grand Nord. Nous constatons également que chaque acteur concerné définit sa stratégie en fonction d’une part de sa proximité par rapport au Grand Nord et d’autre part, en fonction de ses moyens. En effet, les « cinq » ont une approche se caractérisant par le réalisme, en particulier le Canada et la Russie, les deux pays les plus concernés par la région. Et bien qu’il existe certaines coopérations entre les Etats, principalement au niveau bilatéral, les relations se caractérisent par une certaine méfiance (dilemme de sécurité), encourageant non pas nécessairement une course aux armements, mais bien un renforcement des mesures militaires. A un second stade on observe une relation plus coopérative, plus multilatéral au niveau des « cinq plus trois » ou Conseil de l’Arctique, accentuant l’intergouvernementalisme, mais dans des matières d’intérêts secondaires (environnements, secours). Enfin à un troisième niveau, celui des acteurs externes à la question du Grand Nord, ils ont tendance à avoir une approche plus libérale de la question, voulant internationaliser la question à travers l’institutionnalisme ou gouvernance globale (UE et Chine par exemple), mais qui se caractérise plutôt dans les faits par l’institutionnalisme stratégique. En définitive, le Grand Nord encourage de plus en plus les antagonismes entre des Etats aux ambitions géopolitiques et géoéconomiques concurrentes. La rhétorique des Etats n’est toutefois pas toujours constructive pour encourager des mesures de confiance et de coopération118 . En raison des enjeux, des perceptions, des sur des titres historiques ». (Cité dans « Une autre épreuve de force entre le Canada et la interprétations, des faits et gestes, le risque de voir surgir des tensions est réel. Pour Rob Huebert du Calgary’s Centre for Military and Strategic Studies : « Dans l’Arctique, tout le monde parle de coopération et de négociation mais tout le monde modernise et accroît son potentiel militaire »119. Bien qu’il existe certaines coopérations entre les Etats, celles-ci restent encore très embryonnaires. Or, il existe des dangers potentiels importants : trafics, terrorismes, pollutions120. Toutefois, il existe des domaines où la coopération est possible (protection de l’environnement, coordination des opérations de sauvetage, surveillance des voies maritimes121), lesquels pourraient entraîner la confiance entre les acteurs, qui pourrait avoir un effet spill over en matières économique et militaire. Mais, on ne peut exclure une situation plus complexe bien résumée par A. Stein.
(Photo credit: Pixabay)